Les européens ne se sont vraiment intéressés à l'île que 50 ans après sa découverte. Sans richesse, sans épices, sans bois précieux, elle ne représentait que peu d'intérêt.
A partir de 1770, on commence à s'interroger
sur ces géants de pierre : comment ont- ils pu être
transportés ? Il semblerait qu'à cette époque,
les Pascuans ne possédaient plus ce savoir.
Plusieurs hypothèses ont été formulées.
Depuis le Moyen Âge, les géologues étaient
convaincus de l'existence d'un continent, situé dans le
Pacifique Sud, qui pouvait rivaliser avec l'Europe et l'Asie.
Ils en déduirent que le continent aurait sombré
au fond de l'océan, et que l'île de Pâques
en était le sommet. Ce n'est qu'au 19° siècle
que l'hypothèse fut réfutée lorsqu'on analysa
les profondeurs marines entourant l'île.
Dans les années 1950, une autre hypothèse apparaît
: le norvégien Thor Heyerdahl compare et assimile les statues
de l'île de Pâques à des sculptures d'Amérique
du sud. Il en déduit que les statues auraient été
construites par un peuple très évolué provenant
du Pérou qui plus tard aurait été exterminé
par des indigènes de l'île (ceux que Roggeween avait
rencontré). Cette hypothèse fut également
invalidée par le fait que l'on n'ait retrouvé aucune
trace d'une autre civilisation qui aurait vécu à
l'époque des ces statues (les plus connues).
Plusieurs livres de science-fiction ont été édités
comme "Cimetière de l'effroi" de Donald Wendreï,
ou encore "Les sphères de Rapa Nui" de Jimmy
Gieu. On peut dire que le succès ainsi obtenu a contribué
à la dérive connue actuellement. Certains prétendent
que l'île est une base secrète des extra-terrestres
et qu'il y a même une allée s'enfonçant jusque
dans l'océan servant de piste d'atterrissage pour soucoupe
volante ! Et ils auraient déplacé les statues grâce
à l'antigravitation.
Le problème est qu'il existe des méthodes de transport
très simples, réalisables et qui nécessitent
très peu de matériel (qui existait d'ailleurs à
l'époque sur l'île), c'est donc un peu plus probable
que la présence d'extra-terrestres dont on n'a retrouvé
aucune trace, aucun indice pour appuyer la thèse de l'antigravitation.
Les fouilles archéologiques nous fournissent de nombreux
renseignements sur la civilisation pascuane. Les analyses des
grains de pollens ont révélé l'existence
de grands arbres sur l'île, ainsi on sait que l'île
était boisée de palmiers. L'origine polynésienne
des habitants de l'île de Pâques est confirmée
par la découverte d'objets tels que des hameçons
ou des harpons en os qui sont semblables à ceux des îles
les plus proches. Des arêtes de poissons et des os de poulet
nous renseignent sur leur alimentation. Il y avait si peu de gibier
que la pêche devait être une activité des plus
importantes. La prolifération d'outils à certaines
époques, d'armes à d'autres, témoigne de
leur activité principale : la construction des statues
et la guerre. Et les ossements humains retrouvés dans les
ahus nous informent sur leurs moeurs funéraires. Il semblerait
que chaque tribu ou clan possédait son ahu, les statues
posées sur les ahus représentaient leurs ancêtres.
Ainsi tournées face à l'intérieur de l'île,
on peut supposer que les ahus étaient un lieu de culte,
et qu'ils avaient pour rôle de protéger les membres
du clan et servaient de sépultures.
En recoupant les informations des archéologues et celles
fournies par les légendes, l'histoire de l'île peut
être divisée en trois périodes :
- de l'arrivée des hommes jusque vers l'an 1000 :
les Pascuans s'installent.
- de l'an 1000 à 1500 : ils sont au maximum de leur
expansion, ils construisent les statues géantes. Une hypothèse
a été émise selon laquelle la constuction
de statues de plus en plus grandes était une question de
prestige entre les clans.
- de l'an 1500 à 1722 : le déboisement entraîne
les famines et les guerres. Victimes de leur expansion, la surpopulation
entraîne la surexploitation des ressources de l'île,
ou peut être qu'il y eut un changement climatique provoquant
une sécheresse. Une hypothèse concernant l'arrêt
immédiat de la construction des statues serait que les
pascuans auraient perdu foi en leur religion et leur roi (à
cause des famines, ils pensaient qu'ils ne les protégeaient
plus), ainsi les pascuans n'avaient plus besoin de construire
des statues en l'honneur de leurs aïeux.
La rencontre avec le monde extérieur se révéla encore plus catastrophiques que les guerres. Le plus important massacre des Pascuans arriva avec les Péruviens. En décembre 1862, ces derniers débarquent sur l'île et attirent les Pascuans avec des pacotilles, puis les massacrent. La moitié de la population indigène (soit environ 1000 personnes) est emmenée au Pérou et sert d'esclave pour ramasser le guano (excréments d'oiseaux). Après quelques mois il n'en reste qu'une centaine. Ému par leur sort, l'évêque de Tahiti obtient leur rapatriement, mais au cours du voyage 85 meurent de la tuberculose et de la petite vérole. Les quinze rescapés introduisent ces maladies sur l'île. En 1864, lorsque le missionnaire Eugène Eyraud s'y installe, il ne reste plus que 600 habitants, déracinés, déstructurés, qui se convertissent sans résistance au catholicisme.