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Aspects heuristiques

Tous les livres d'astronomie le disent : l'image d'une étoile dans une petite lunette est une tache circulaire entourée d'anneaux ; cette figure est appelée tache d'Airy et sa taille est inversement proportionnelle au diamètre de l'objectif. Son existence conditionne le pouvoir séparateur de l'instrument à une valeur proche du diamètre de la tache :

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si la longueur d'onde est voisine du maximum de sensibilité de l' tex2html_wrap6045 il humain, soit vers 5000 Å. Ainsi on peut séparer à l' tex2html_wrap6045 il nu des détails voisins de la minute d'arc (soit une pièce de 10 centimes vue à 70 mètres). Une lunette de 120 mm de diamètre résoud la seconde d'arc et permet d'apprécier le caractère circulaire des satellites de Jupiter, tandis que le Soleil est résolu depuis la Terre avec un instrument de 70 microns.

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Figure: Illustration des effets de la turbulence lorsqu'on observe une étoile avec des télescopes de diamètres croissants. On remarque que la turbulence étale l'image de l'étoile dans une tache dont la taille est indépendante de l'instrument. C'est la tache de ``seeing'', qui caractérise l'ouverture du télescope équivalent dont nous avons parlé dans le texte. Par contre l'image est constellée de petits granules (les speckles) dont la taille est de l'ordre de la tache d'Airy théorique de l'instrument ; plus celui-ci est gros, plus il y a de granules.

Observons une étoile à travers une petite lunette, par exemple de 50 mm : avec un oculaire fort, on distingue très bien la tache d'Airy entourée d'anneaux complets dont la brillance diminue quand on s'éloigne du centre. Mais cette image n'est pas fixe : elle est le siège d'une agitation qui la fait se mouvoir lentement dans le champ, trahissant la présence de turbulences dans les masses d'air traversées par la lumière de l'étoile.

Prenons maintenant un télescope un peu plus grand, par exemple 12 centimètres : la figure d'Airy est toujours visible quoique plus petite que la précédente, mais elle semble parcourue par de légers tremblement rapides qui brisent et font danser les anneaux.

A partir de 20 centimètres, l'image prend un aspect planétaire et se fragmente en plusieurs morceaux. L'agitation est vive et l'image explose parfois jusqu'à un diamètre de dix secondes. Les anneaux de diffraction ont complètement disparu sauf pendant les brefs instants où l'atmosphère redevient calme (trous de turbulence).

Dans un télescope de 50 centimètres et plus, l'image devient un épouvantable bouillonnement de petits grumeaux de lumière (couramment appelés speckles ou tavelures) qui s'agitent constament dans une zone de plusieurs secondes d'arc. On observe là un véritable plateau d'intensité dont l'étendue ne dépend que du degré de turbulence atmosphérique. Une description très réaliste de cette figure a été donnée par Jean Texereau [75] dans son ouvrage sur la fabrication des miroirs, et par Danjon et Couder [35].

C'est la turbulence qui limite en définitive la résolution des télescopes observant à travers l'atmosphère. Les observateurs avaient l'habitude de la classer sur une échelle à cinq degrés suivant la qualité des images qu'ils observaient dans un télescope donné ; cette échelle reproduite en figure gif a été remplacée par un concept plus moderne de télescope équivalent. C'est celui qui donnerait une tache d'Airy d'une taille égale à l'étalement produit par la turbulence. Le diamètre de ce télescope équivalent est généralement compris entre 5 et 20 centimètres limitant la résolution à une valeur proche de la seconde d'arc. On pourra alors noter que le télescope géant du Mont Palomar n'est guère meilleur qu'un petit 115/900 du commerce du point de vue de la résolution... Il m'a été donné d'observer le trapèze d'Orion dans un télescope d'un mètre de diamètre par forte turbulence : les images sont très empâtées, les étoiles sont très élargies et les fins détails disparaissent. L'image est lumineuse mais floue, et les étoiles les plus faibles s'évanouissent. Par contre lorsque la turbulence est moins mauvaise, ce qui arrive parfois, les images du grand télescope sont infiniment plus riches et plus détaillées que celles d'un petit. Et il est certain qu'en l'abscence totale de turbulence (c'est à dire dans l'espace) la tache d'Airy serait observée quel que soit le diamètre de l'instrument.

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Figure: Reproduction de l'échelle à cinq niveaux qui était utilisée par les observateurs pour estimer la turbulence en fonction de la taille de leur instrument (d'après ``La construction du télescope d'amateur'' -- SAF).

Dans l'espace la turbulence n'existe pas. Les étoiles sont fixes et paraissent plus éclatantes, n'étant pas affaiblies par l'atmosphère ; témoins les multiples témoignages des cosmonautes qui ont eu le privilège d'observer ``là-haut''. Un télescope dans l'espace donne la pleine mesure de son potentiel collecteur et résolveur. D'où l'idée d'envoyer un grand télescope automatique en orbite : c'est le projet ``Hubble Space Telescope'' qui prit naissance au début des années 60. Mais les missions spatiales coûtent cher et la maintenance des satellites est difficile. Par exemple le télescope spatial ne sera équipé d'une optique correctrice que vers 1994, soit quatre ans après son lancement. Sur Terre, l'anomalie aurait pu être réparée beaucoup plus vite et à moindres frais.

C'est au début des années 1970 que naquit l'espoir de réaliser des images à haute résolution depuis la Terre ou tout au moins de récupérer une partie de l'information détruite par la turbulence. Les observateurs d'étoiles doubles serrées avaient déjà remarqué que l'image d'une binaire était simplement la superposition de deux images speckles décalées de la séparation des étoiles. Avec un peu d'entrainement, ils arrivaient à mesurer des couples distants de 0''3 [75]. Parallèlement les progrès de l'optique cohérente et les expériences de diffusion de lumière laser dans des milieux inhomogènes avaient montré la présence de speckles dans la lumière diffractée [33]. Antoine Labeyrie en 1970 montra que les granules présents dans les images d'étoiles étaient de même nature que les speckles laser, à ceci près que les speckles astronomiques se renouvellent toutes les 10 millisecondes environ sous l'effet des fluctuations thermiques de l'atmosphère [50]. Au Mont-Palomar, il prit des clichés instantanés d'étoiles simples, doubles et géantes théoriquement résolues par le télescope : l'analyse de ces clichés permit d'observer des détails à la résolution théorique de l'instrument (25 millisecondes d'arc) [51].


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Petit blaireau rouquin
Sat Dec 28 17:22:51 MET 1996