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La méta-analyse en parapsychologie ? ...
Henri BROCH
Université de Nice-Sophia Antipolis
"La
méta-analyse", "la
méta-analyse", "la méta-analyse". C'est le cri du coeur actuel des
parapsychologues
qui depuis de longues décennies se
désespèrent
de ne pouvoir offrir la plus petite preuve en faveur de pouvoirs-psi
de quelque type que ce soit.
- Exit les résultats époustouflants d'un J.B.
Rhine
(présenté - sans rire - comme "le
père
de la parapsychologie scientifique") obtenus à
partir d'un tri intellectuellement malhonnête des
données
et/ou d'une utilisation de cartes de Zener tellement mal faites
que même un débutant refuserait de travailler avec
!
Après plusieurs achats au cours des années, j'ai
encore acheté en octobre 2000 des cartes de Zener (cinq
symboles : carré, rond, croix, étoile, vague)
à
"l'Institut de Rhine". Incroyable mais vrai : elles
sont toujours très mal faites
après plus de
60 années de fignolage par les savants parapsychologues
!
Et elles ont encore un dos non symétrique !! On peut ainsi
très facilement reconnaître des cartes de dos et
faire allègrement grimper les statistiques sans le plus
petit pouvoir-psi. Et après cela, d'aucuns tresseront
toujours
une auréole de scientificité aux
expériences
de J.B. Rhine et de ses successeurs Sans commentaire.
- Exit les résultats extraordinaires d'un S.G. Soal ("le
plus grand parapsychologue anglais") dont les travaux
sur la perception extra-sensorielle faisant autorité dans
le monde entier ont été en
réalité
obtenus à partir d'un lamentable tripatouillage des
données
cibles par cet éminent charlatan.
- Exit les résultats d'un W. Levy (Directeur de "l'Institut
de Parapsychologie" le plus célèbre du
monde) pris en flagant délit de fraude.
- Exit les résultats claironnés de grandioses
expériences
de sensiblité de l'homme aux infimes gradients de champ
magnétique dont le ridicule du protocole déridera
encore longtemps ceux qui s'y sont vraiment
intéressés.
- Exit les résultats d'expériences comiques d'un
pseudo-professeur travaillant dans un pseudo-laboratoire ; exit
les résultats largement claironnés dans les
médias
mais jamais publiés dans des revues sérieuses,
etc.
La "méta-analyse", voilà le nouveau credo.
En analysant, avec un peu de recul, avec un peu de "hauteur",
les données de plusieurs expériences sur les
pouvoirs-psi
(et, notez-le bien, aussi ahurissant que cela paraisse
méthodologiquement
parlant : pas forcément sur le même
type d'expériences
!) des parapsychologues clament qu'ils ont fait la preuve de
l'existence
desdits pouvoirs.
Leur argumentation est la suivante : il est impossible que, par
pur hasard, l'on obtienne autant d'expériences positives
en faveur du psi et l'argument des sceptiques disant que "de
nombreuses expériences ayant donné des
résultats
négatifs n'ont, elles, pas été
publiées"
n'est pas recevable car la méta-analyse permet de
démontrer
- dixerunt toujours les parapsychologues - que ces
expériences
négatives devraient être en nombre très
très
important, ce qui ne peut objectivement être le cas.
Avant de se lancer dans de savants - et forts longs ! - calculs
de statistiques pour vérifier une affirmation ou une autre,
il est bon de réfléchir quelques instants et de
faire travailler nos neurones.
Les parapsychologues se livrant
à la
méta-analyse posent la question ainsi :
"Quel est le nombre N d'expériences non publiées,
donnant une valeur moyenne m, qui devraient exister
pour
que les n expériences
réussies publiées
et représentant un écart significatif
à cette
moyenne m (et prises comme preuves de la
validité
de pouvoirs-psi) soient dues uniquement au hasard avec une bonne
probabilité ?"
Après de savants
calculs qui en jettent
plein la vue au public ébahi et aux parapsychologues
provinciaux,
ils en arrivent à la conclusion suivante : ce nombre N
serait littéralement immense et donc cela
démontre
qu'un tel nombre d'expériences non publiées n'est
pas réaliste et n'existe donc pas.
Re-conclusion : les pouvoirs-psi sont également
démontrés
par la méta-analyse des données disponibles,
méta-analyse
qui montre que ces résultats ne peuvent pas être
dus au hasard.
Ce n'est pas de la méta-analyse, c'est plutôt...
de la pata-analyse ! (En hommage à Alfred Jarry et sa
pataphysique.)
Pour que le raisonnement soit correct, il faut
procéder
différemment.
Il ne faut pas chercher le "nombre N d'expériences
non
publiées, de moyenne m, qui devraient
exister"
car cela
reviendrait
ipso facto à dire,
avant tout
calcul et toute interprétation du résultat de ce
calcul, que
les n résultats
positifs publiés que l'on veut tester sont
déjà
hors de la population que l'on étudie et donc
déjà
"hors-normes", déjà "extraordinaires"
!
En effet, cela signifierait que sans les prendre en compte le résultat moyen est m.
C'est une grave erreur
de raisonnement,
un véritable Effet
cerceau dans lequel on impose
ainsi tout
simplement au départ ce que l'on entend démontrer.
En effet, si l'on veut tester si les n
résultats
positifs publiés sont des résultats obtenus par
hasard au sein d'une population donnée, il faut bien
évidemment
(je dis bien "il faut" ; cela est une obligation et
non un simple souhait ou une simple possibilité) que ce
soit la moyenne de cette population totale qui soit égale
à m et non le seul sous-ensemble des
résultats
non publiés.
Il faut que, lorsque l'on regroupe toutes les expériences
(c'est-à-dire N expériences non
publiées
+ n expériences réussies
publiées),
l'on obtienne alors - et alors seulement - une moyenne de valeur
m.
En d'autres termes, le
nombre N d'expériences
que l'on cherche ne doit concerner que des expériences
dont le résultat est une valeur inférieure
à la
moyenne m !
(Du "psi-missing" - pour reprendre la ridicule position
de repli de parapsychologues en déroute - en quelque
sorte !)
Et dans ce cas-là, le nombre N recherché est
évidemment
beaucoup plus restreint et l'existence d'un tel nombre
d'expériences
négatives deviendra ainsi beaucoup plus probable !
Il semblerait que les grands
méta-analystes
parapsychologues de service aient oublié ce très
léger détail.
Et tant qu'ils n'auront pas mené leurs chères
études
méta-analytiques de cette seule correcte
façon
- ce qui n'est, pour l'instant, pas le
cas - il
est tout à fait inutile de discuter ne serait-ce que d'un
iota de leurs résultats.
Références
- Henri Broch, "Le Paranormal", collection
Points-Sciences,
Seuil, Paris 2001
- Henri Broch, "Au Coeur de l'Extra - Ordinaire",
nouvelle édition Book-e-book.com, 2002
Cf. la partie consacrée à la Parapsychologie
(cliquez ici pour une table des matières
complète) dans cet ouvrage
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