et acquisition des connaissances
Pr. Henri BROCH
Université de Nice-Sophia Antipolis
Mais à chaque étape, on peut trouver ces différentes manières combinées de diverses façons dans les recherches et c'est ce qui en fait toute la richesse et la variété.
De même, chaque observation, chaque opération, est sujette à erreur mais - et c'est le point fondamental qui différencie nettement la science et sa méthode des autres domaines de connaissance24 et de leur démarche - toute erreur peut être corrigée. Ce qui nous montre que l'on peut connaître le monde, l'univers qui nous entoure, même si cela se fait et se fera encore de manière partielle, même si cela se fait et se fera encore graduellement dans le temps et, ce, même si cela se fait de manière imparfaite dans l'espace ou dans le temps.
La science n'est pas le meilleur mode d'acquisition de connaissances et de compréhension du monde ; la science n'est pas non plus le moins mauvais mode que nous puissions avoir. La science est tout simplement le seul mode de connaissance permettant de comprendre l'univers qui nous entoure. Des domaines, il en existe certes beaucoup mais magie, religion et pseudo-sciences ne sont pas des moyens de connaissance. La science est en fait tout simplement le seul domaine qui intègre un processus auto-correctif de découverte.
Une pseudoscience n'est pas simplement une "non-science" c'est-à-dire un domaine de connaissance qui ne correspondrait pas à des critères25 de scientificité reconnus, un domaine hors du champ scientifique ; c'est en fait un domaine qui, bien que a-scientifique est... présenté comme scientifique.
Il s'agit donc ici d'une fraude à l'appellation et, de la même façon que l'on n'accepterait pas que l'on nous présente une vin frisant la piquette comme un grand cru, il faut dénoncer de telles fraudes. Ce que l'astrophysicien Evry Schatzman a formulé clairement : si la malhonnêteté intellectuelle n'est pas un délit, il n'est ni interdit ni diffamatoire de la dénoncer.
En élargissant encore le propos, il faut signaler que la religion, la magie et les pseudosciences sont, si on désire leur accorder tout de même le statut de modes de connaissance, nettement moins efficaces et de portée nettement moins universelle que la science et la technologie puisqu'elles n'intègrent pas directement en elles-mêmes la recherche et ne possèdent pas de mécanismes auto-correctifs.
C'est d'ailleurs ce manque spécifique qui explique que religion, magie et pseudosciences n'ont que peu - pour ne pas dire en rien - modelé le monde actuel, le monde physique, dans lequel nous vivons26 ; monde qui doit, par contre, beaucoup à la science et la technologie.
- La multiplication magiques des billets de banque réussie par le marabout local (en France et au XXIe siècle !) qui enferme du papier journal dans une marmite afin que la magie et les poudres de perlimpinpin opèrent n'a jamais mis en grand péril les banques. Alors qu'une simple manipulation subtile, par un jeune "trader" de la Société Générale, des possibilités que l'informatique nous a apportées...
- Si l'on peut voir et entendre à très grande distance un journaliste nous présenter en direct quelques informations fortes, ce n'est pas vraiment grâce au développement de nos extraordinaires pouvoirs-psi mis en évidence et sublimés par les longues et savantes recherches des parapsychologues et autres métapsychistes depuis près de deux siècles (ils n'ont, contrairement à leurs allégations, strictement rien trouvé). Par contre, les ondes hertziennes et la télévision, et en nettement moins de temps,...
Si un domaine "a-scientifique" ne pose aucun problème puisque un tel secteur de l'activité humaine ne relève pas des champs de recherche, les pseudosciences sont, comme l'a montré un collègue physicien27, potentiellement destructrices pour l'homme parce que :
- Elles corrompent de ce fait l'approche scientifique et la méthodologie qui caractérise cette approche ; elles corrompent l'esprit de la science.
- Elles "contaminent" parfois des domaines scientifiques, en particulier les domaines jeunes, émergents, qui ne disposent pas encore d'une base de fondations suffisamment établies.
- Elles sont accessibles (et pour cause, elles doivent "se vendre") à des millions de personnes puisqu'elles ne demandent strictement aucun travail, faisant ainsi percevoir les sciences véritables comme "élitistes" puisque nécessitant un travail et une formation spécifique.
- Elles reçoivent le support de groupes de pression puissants (il suffit de penser à quelque secte bien établie pour se rendre compte de cette puissance) et un accueil chaleureux de la part de certains médias dits de masse qui ont un intérêt commun : que l'esprit critique de leurs adeptes ou auditeurs ne se développe pas.
Et pourtant, il faudrait tout de même se rappeler que :
- La voyance (la "précognition") viole le principe de causalité qui implique très simplement qu'un effet ne peut se produire avant sa cause (le point le plus charmant est de constater que certains voyants, gourous ou parapsychologues n'hésitent pas à invoquer Ste Mécanique Quantique qui, selon eux, rendrait obsolète la causalité ! Quelques cours de physique seraient peut-être les bienvenus...).
- Sans même parler du fait qu'elle viole assez souvent le principe de conservation de l'énergie28, la psychokinèse viole aussi le postulat que l'esprit ne peut agir directement, sans intermédiaire, sur la matière29.
Mais, direz-vous, ce n'est qu'un postulat. Certes, mais raisonnons un peu et imaginons que ce postulat soit faux et, qu'en conséquence, l'hypothèse suivante "l'esprit peut agir effectivement, directement et sans aucun support, sur la matière" soit vraie. Alors, une des conséquences est qu'aucun expérimentateur - pas même un parapsychologue bien sûr - ne peut se fier à ses propres lectures sur ses propres instruments... puisqu'il peut interagir avec !
Et donc qu'aucune preuve - qu'elle soit dans le sens positif ou négatif, peu importe - de quelque pouvoir-psi que ce soit ne peut être apportée.
Après ces quelques réflexions générales sur la nature du raisonnement scientifique, la structure de son cheminement "induction-déduction-rétroaction" et ce qui différencie les domaines scientifiques des domaines a-scientifiques ou pseudo-scientifiques, il est temps de partager quelques données plus concrètes et plus divertissantes.
(...)
[Les données concrètes et divertissantes dont il est question forment les pages 42 à 57 de l'ouvrage "L'Art du doute" de Henri Broch dont est extrait le présent article ; ces données couvrent des sujets comme : la voyante Maud KRISTEN et le parapsychologue Yves LIGNON dans le reportage TV "Capricorne Ascendant Sceptique" diffusé sur Planète Future, le miracle de l'hostie sanglante de Bolsena au XIIIe siècle en Italie,...]
H.B.
Références
:
24) Ces domaines constituent les "champs cognitifs" :
secteurs de l'activité humaine qui visent à recueillir,
diffuser ou utiliser des connaissances d'un certain type ;
que ces connaissances soient vraies ou fausses, peu
importe.
25) Cf. H. Broch "Sciences, pseudosciences et
Zététique", article du Dictionnaire
Encyclopédique Quillet Actuel 1994, pp. 184-190.
26) Je ne
parle pas de comment
nous y vivons car dans le "comment" interviennent évidemment
des
caractéristiques subjectives et, pour beaucoup
d'êtres humains sur
notre planète, en large partie religieuses.
27) Cf. Mario Bunge, "Understanding the world",
Treatise on Basic Philosophy vol. 6, Ed. Reidel, Dordrecht 1983.
28) Essayez de déplacer à distance par le seul
pouvoir de concentration de votre esprit - votre cerveau, un "objet"
d'une puissance d'une dizaine de watts - par
exemple un objet ayant une masse de 100 kg et de le soulever de 30 cm
en une demi seconde...
29) Matière autre que celle de son propre corps
évidemment ; il n'y a rien
de paranormal à ce que nous puissions par notre
"pensée" donner, par
exemple, l'ordre à un muscle de se contracter et ainsi de
lever notre
bras.
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